Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Cluchier (Alice) Années 1945-1980

 

Alice Cluchier

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Photo publiée dans laprovence.com

 

Lieux de référence:

Naissance à Saint-Martin de la Brasque (Vaucluse) DOIGT 26.jpg

Montfavet (Avignon): Bibliothèque "Paul et Alice Cluchier".  DOIGT 26.jpg

 

Bibliographie

1945 : Cris et tourments

1947 : Au rouet de l’amour

1949 : En fanant l’air sentimental

1950 : Le coeur et la croix

1954 : La folle ivraie

1956 : Mon pain de vie

1957 : Incandescence (choix de poèmes)

1959 : Les vagues du coeur

1963 : Ciel et fumée

1963 : Avignon la fascinante

1966 : Couleurs d’arlequin

1967 : Mon ombre et Dieu

1969 : Roses voilées d’embrun

1970 : Du vitrail à la lumière

1972 : L’ivresse de la source

1974 : Le temps d’effeuiller un nuage

1976 : Ce feu qui me déroute

1978 : L’ancolie du silence

1981 : Un envol d’étincelles

1982 : La cueillette émerveillée (poèmes pour enfants)

1982 : L’heure des volet clos

1984  : Ces mots jetés au vent d’hiver

 

Au Rouet de l'Amour

 

Amour ! divine flamme ! Amour triste fumée !

                                       TOULET

 A Elisabeth Borione

 

Au Rouet de l'Amour

 

Mon amour le plus doux est celui que je file

Avec des fils de vierge à l'aube d'un serment.

Il est si délicat qu'un geste malhabile

Arracherait le voile au bel enchantement.

 

Mon amour le plus pur est celui que j'enroule

Aux fuseaux du printemps avec un lin tout neuf.

Je l'enchevêtre au nid de l'oiseau qui roucoule,

Car il a l'innocence et la candeur de l'oeuf.

 

Mon amour le plus fort est celui que je tisse

De mes fibres de chair aux coloris de sang ;

En sa toison d'ardeur le plaisir nu se glisse,

S'électrise aux replis des tons incandescents.

 

Mais l'amour se dévide à l'abandon des heures,

L'écheveau se ternit aux souffles de l'adieu,

La chaîne se distend à l'usure des leurres,

Et mon Rêve en haillons suit le linceul d'un Dieu.

 

 

 

 

"Et s'être vu longtemps, c'est presque s'être aimé."

A. GUIRAUD

 

A mes amis.

 

L'Amitié

 

Sentiment de velours dont la douceur délivre,

Transparence du coeur, épanchement serein,

Indulgence des jours, apaisement de vivre,

Tu prends l'air de bonté qui colore le pain.

 

Tes appels ont l'élan et la blancheur des ailes,

Cette limpidité des jardins et des eaux.

Ta générosité soulève nos fardeaux,

Et craint de réveiller nos torpeurs sensuelles.

 

Ta tendresse m'évoque un amandon tout vert,

Où s'implantent nos dents saccageant les promesses ;

Tu ne sens pas le mal des ingrates faiblesses,

Et tends, sans défaillir, ton regard découvert.

 

Tu résistes au temps destructeur qui chemine,

Et pour symboliser l'éclat pur de ton miel,

Je brode en ton honneur sur ce fanion bleu-ciel,

L'abeille aux anneaux d'or sur une balsamine.

 

 

 

"L'air est plein de frissons des choses qui s'enfuient"

Baudelaire

 

A Emile Henriot

 

Frisson

 

Dans l'espace, tout bruyant d'ailes,

Mon âme a glané ce frisson,

Il roucoule en la la tourterelle,

Et donne l'essor au pinson.

 

A l'onde que la brise inspire,

L'ai-je capté triomphateur,

A l'heure où l'éphémère attire

L'envol du désir prometteur ?

 

Sur une tige d'herbe folle,

L'ai-je pris dans le blé mouvant,

Lorsqu'une plainte douce et molle

Surgit sous l'emprise du vent ?

 

Mon sang fut-il le réceptacle

Du sanglot qu'un archer traduit,

Quand l'étoile éclaire un miracle

Dans les plis secrets de la nuit ?

 

Du charme d'une voix lointaine,

M'offre-t-il les virils échos,

Se répercutant dans la plaine

Sur un ton de coquelicots ?

 

Il m'étourdit comme un malaise,

Ce frisson clair, bleuté de joie.

Vois sur mon coeur combien il pèse,

Malgré son frôlement de soie.

 

 

 

"La rose qui ressemble à ce que fut ta bouche"

H. de Regnier.

 

Rose-Provence

 

Hésitante rose, en bouton discret,

Qui n'ose s'ouvrir au ciel des caresses,

Le printemps est court ! L'été lourd d'ivresses,

T'épanouira de désir secret.

 

La rose naîtra, déjà condamnée

A s'offrir au flux des fièvres errantes.

Par ce seul contact de chair satinée.

 

Ephémère fleur ! sur un sol d'ennui

Glissera l'envol, pétale à pétale ;

Mais tu laisseras de ta beauté pâle,

Cette volupté qu'est l'âme des nuits.

 

Aux jardins de France où ton nom s'impose,

Ton parfum constant dans l'air flottera ;

Et je presserai des buissons de roses,

Quand mon sang vermeil d'amour flambera.

 

 

Parfum de la marguerite

 

Ta collerette amidonnée,

Etale l'orgueil d'un destin,

Auquel notre âme est condamnée

Par quelque oracle sibyllin.

 

J'effeuille au vent la marguerite :

Un peu... beaucoup... farouchement.

O nuances d'un sentiment,

Dans les prés où l'espoir s'agite !

 

Et je me penche sur mon coeur

Que le mal martelant effrite ;

Mais je respire du bonheur,

Sur l'inodore marguerite.

 

 

 

 

"Beauté ! mon seul souci"

                     Malherbe.

 

Au peintre CHABAUD

 

A un artiste

 

O toi qui peins les teintes roses

De l'aube en fleurs sur les sillons,

Les halliers peuplés d'oisillons

Et le coeur de toutes les roses ;

 

Les chauds coloris de l'été,

Les corselets des demoiselles,

Le tulle vivant de leurs ailes ;

Mille formes de la beauté ;

 

Les tons safranés de l'automne,

La vigne vierge en ses ardeurs,

Et la brume aux froides pâleurs

Sur le bois qui se découronne ;

 

Les dentelles et les festons

Que la glace brode aux fontaines ;

La neige saupoudrant à peine

Le Noël des petits santons ;

 

Pourrais-tu fixer sur la toile

A l'heure où tinte l'angélus,

Cette larme d'or de Vénus :

L'éclat de la première étoile ?...

 

 

 

 

"Avril est revenu pour jouer avec nous"

 

Nuit d'Avril

 

A l'avril, clair d'aménité,

La nuit offrait son diadème.

J'avais grand peur d'être moi-même,

Mon coeur sur ton souffle arrêté ;

 

Ton bras était l'anse légère

Où se suspendait l'heure en fleurs ;

dans la transparence des pleurs

L'âme prolongeait l'éphémère.

 

Ma lèvre avait un mol contour...

Tu ne saisis qu'un cheveu d'ange ;

par leur scintillement étrange,

Les astres retenaient l'Amour.

 

Tout d'innocence, en son mensonge,

Le lit du printemps était pur.

Nos yeux, limpides dans l'obscur,

Créaient l'éternité d'un songe.

 

p. 15

 

 

Prix décernés à la poétesse

DOIGT 26.jpg

Cluchier Ac. Fr.jpg

 

 

 

2 poèmes publiés dans "Les Cahiers", Juillet-août-septembre 1962

 

Poème

 

Les serpents de nos forêts vierges,

Les requins qui des eaux émergent,

L'aveugle termite des bois

Et les loups voués aux abois

 

Pourraient-ils broyer nos chimères?

Dévorer à dents meurtrières

Le corps vierge de la beauté?

Boire des puits de pureté?

 

Vouer à la laideur amère

La pulpe et l'esprit de la terre?

Songe et magie, il n'en est rien,

Le mal met en relief le bien.

 

Posons nos yeux sur la palombe

Sur le symbole des colombes

Quand un souffle d'amour humain

Fait s'ouvrir le coeur et la main.

 

 

Clair de lune...

 

Clair de lune sur Pont Levis,

Un fantôme en cotte de maille

Avec ses remords s'est assis.

Manants, chantez vaille que vaille!

 

Sa guitare n'a plus d'accord,

L'absence a distendu les fibres,

Et les regrets de l'homme libre

Profèrent des rythmes discords.

 

Un fin rideau s'est entr'ouvert

L'embrasse avait la souvenance

D'un chevalier au coeur offert,

Mendiant d'amour sans redevance.

 

Mais de sa lance il se servit

Blessant à vif la douce infante,

Et depuis sa vie en tourmente

Connaît l'errance des proscrits.

 

Qu'attendrait-il, jour après jour?

La Belle dort et ne s'éveille.

La mort est hélas sans retour.

Par la douleur qui s'émerveille

Le pardon fait un bruit d'abeille.

 

 


2 poèmes publiés sur la page "Forum au féminin"


Tendresse


Plus douillette qu'un fin duvet,
Elle adoucit les meurtrissures,
Panse de secrètes blessures,
Etouffe le feu du regret.

A l'affût des moindres bonheurs,
Prompte à colorer l'instant pâle,
Elle sait t'isoler des râles,
Pour t'offrir l'espace des fleurs.

Fidèle à ton éloignement,
Comme à nos abandons si proches,
Elle endort soucis et reproches
Au rythme de son bercement.

Enroulée au fruits de tes ans,
Vibrante harpe de caresses,
Se penche sur toi ma tendresse;
Sauvegardant ton coeur d'enfant.

 



Le petit monde des enfants


Le ciel enveloppe nos jeux ;
Nos cris sont ceux de l'hirondelle,
Un papillon nous rend heureux
Nos bras battent comme des ailes.

En nous le soleil resplendit.
Tous les instants sont des arômes.
Le sol reflète un paradis :
Celui de la fée et des gnomes.

Le frais encens venu des tiges,
Du sang végétal et des troncs,
Nous donne de joyeux vertiges,
Que les songes étoileront.

Nous sommes des rais de lumière
Pris à l'écart de la beauté.
Notre regard reste fixé
Sur l'entrelacs de la chimère
Et le cristal des puretés.

 

 

 



16/05/2012
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