Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Lanctot (Clara) 1886-1958

Clara Lanctot

1886-1958

 

 

- Québec

- Poétesse aveugle

 

Souvenirs

 

Visions d'aveugle (1912)


 

 


- Visions d'aveugle, 1912

- Visions encloses, 1930

 

 

A mes amis les poètes

 

O poètes aimés qui devinez mon âme,

Touchée de vos accents, je m'incline vers vous,

Et je cherche en vos vers ce que mon coeur réclame

Pour animer ses chants et ses rêves si doux.

 

Vous qui chantez si bien le doux bonheur de vivre,

Les jours ensoleillés du radieux printemps,

Et les tendres pensées dont votre coeur s'enivre,

Qui couronnez les fronts heureux de leurs vingt ans;

 

Tournez votre regard vers une jeune amie

Dont les yeux sont fermés aux rayons lumineux,

Mais dont l'âme pourtant s'ouvre à la poésie

Comme une tendre fleur à la clarté des cieux.

 

Oh! oui, faites briller tous les jours, à toute heure

L'étoile de votre art sur mon ciel toujours noir.

J'aurai l'illusion d'un astre qui demeure

Pour verser sur ma vie un doux rayon d'espoir.

 


 

Souvenirs

 

Je jouissais encor de la pure lumière,

Sans jamais me douter que bientôt un brouillard

Voilerait pour toujours l'éclat de mon regard.

Oh! souvenirs d'alors, vivez sous ma paupière...

 

Eclairez tous mes jours, beaux astres radieux,

Afin qu'après seize ans, je puisse voir encore,

En mes sombres pensées, un ciel qui se colore,

Une nature en fête, un sourire joyeux.

 

Lorsqu'au sein de ma nuit, je fais chanter ma lyre,

Il me semble revivre, et je rêve parfois,

Que par mes yeux ouverts, dans mon coeur je reçois

Le charme des beautés dont ma muse s'inspire.

 


 

Fleur languissante

 

Pauvre fleur sans parfum, au calice flétri:

Tu ne souriras plus à la brise qui passe;

Le soleil baise en vain ton beau satin pâli,

Tu languis tristement sur ta tige trop lasse...

 

Demain, quand reviendra l'aurore au front joyeux,

Poser sur chaque fleur une perle brillante,

Tu ne seras plus là, dans les buissons ombreux,

Pour t'incliner aussi, sous sa main caressante.

 

Tes pétales ternis, trop longtemps altérés,

Demanderaient en vain à boire l'onde pure:

Meurs, ainsi que les coeurs à jamais ignorés,

Qui n'ont pas eu l'amour pour guérir leur blessure.

 


 

Ma lyre aimée

 

Pour dire ma douleur, ma lyre, les accents

Dans un accord plaintif vibreront bien longtemps.

Tu n'auras à chanter que ma vie incolore,

Que mes jours sans rayons, que mes nuits sans aurore.

 

Si mon triste printemps, au moins pouvait t'offrir

Une riante fleur, un heureux souvenir!...

Autour de moi, je cherche une feuille encor verte,

Et je n'en peux trouver sur ma route déserte.

 

Dans l'obscur du chemin, toujours à la douleur,

Dur et âpre rocher, je déchire mon coeur;

De mes illusions, la couronne flétrie

S'effeuille tristement tout le long de ma vie.

 

Quand mon front, lyre aimée, une dernière fois,

Vers toi se penchera, fais entendre ta voix

Pour répondre à l'adieu de mon âme qui t'aime:

Que ton dernier accent soit le baiser suprême...

 

Poèmes tirés du recueil "Visions d'aveugle" (archive.org)



29/08/2011
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