Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Azaïs (Simonne)

Simonne (Michel) Azaïs

(vers 1950)

 

 

Simonne Azaïs posant pour Madeleine Scellier (Sabine Huet)

 

Consulter la page de Sabine Huet  DOIGT 26.jpg

 

 - Poèmes interdits, 1953

 

 

 

 

 

Messe noire


Mon corps est un désir
Comme l’hostie est dieu
Mon amant
Ce prêtre à l’autel
Qui communie avec mes lèvres
Lèvres de sang
Sang
De ma chair
Qu’à l’offertoire
Il baise
Sabbats hallucinants
Des nuits ensorcelées
Que le diable conduit
Ivre de nos cantiques
Et que le jour va
Souffleter.

 


Solitude


C’est l’heure où je suis seule
C’est l’heure du jardin
Qu’on arrose
Et des senteurs mouillées
Qui montent des gazons
C’est l’heure où ton désir
Vient émouvoir ma croupe
Egarer ma main blanche
Et caresser mes seins
C’est l’heure où nos parfums
D’imprécises musiques
Et mes rêves épars
Font jaillir de ma chair
Les soupirs de la nuit
C’est l’heure où sans témoins
Que ces riens
Impalpables
Je peux
Tout à loisir
M’aimer
De ton amour.

 


Intimité


Mes cheveux sont défaits
Une rose s’effeuille là
Au bord de mon sein qu’ont effleuré tes doigts
Sur mon bras
Traîne encore une amoureuse haleine
Et ma cuisse s’émeut aux douceurs de la soie
Je suis lasse
Et pourtant je me sens éternelle
Et si belle
Si belle à cet instant
Où j’ai vécu par toi.

 


 

Homo sapiens


Le dieu est mort
Pourquoi
Le bleu du ciel l’a pris
Et l’a gardé pour lui
Il reste aux hommes la noirceur
Du goudron
Et les cailloux impitoyables de la route
Et les croupes offertes
A leurs phallus bandant
Il reste aux hommes du printemps
Sans éveil
Et des étés sans fête
Et les ventres gonflés
De leur pollen au vent

 

                            S.-M. Azaïs


 

(Si donc ce soir)

 

Si donc ce soir
Tu m’avais prise
Tu aurais mangé mon parfum
Que restait-il
Entre mes cuisses
Et sous mes bras
Et sur mes seins
Pour qu’à la nuit je me confesse
Et me baise
Jusqu’au matin.

 

 


Chant d'amour

Que nos cuisses enlacées
L’odeur de nos corps sans honte
Nos bouches infatiguées
Et nos sexes qui s’affrontent
Mes seins
Ton membre dressé
A l’amour qui nous harcèle
Nos sanglots entrecoupés
Que la jouissance appelle
Notre désir épuisé
Qui revit sous nos caresses
Nos chairs
Émues de baisers
Que des doigts plus fiévreux pressent
Nos ventres
Enfin soudés à l’aube conceptionnelle
Fassent de ces nuits passées
Un chant de rut
Éternel.



25/09/2011
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