Baye (Baronne de) 1859-1928
(1859-1928)
La danseuse
Le vent pleure en glissant sur les fleurs vagabondes,
Le vent chante en glissant dans tes longs cheveux roux;
Tu vas, sans relever ton front lourd de courroux...
Tes sandales de cuir font craquer les noix blondes.
L'automne a secoué ses feuilles sur les ondes
Tu vas, par le chemin mystérieux et doux i
Où jadis tu dansais, le péplos aux genoux,
Sous les rythmes vibrants de mes cymbales rondes...
Hellé ! reviens t' asseoir à mon foyer discret;
J'ai dérobé pour toi..,gardes-en le secret!
Un petit miroir d'or et des colliers d'opales...
Je tairai mon amour afin de t' apaiser...
Des anneaux merveilleux cercleront tes doigts pâles
Et tu me donneras tes pieds pour les baiser !
L'Ame brûlante.
Madame "Lilas bleu"
Madame « Lilas Bleu » sort de son blanc yamen,
Souple, battant des bras pour garder l'équilibre.
Tel un oiseau captif tout joyeux d'être libre...
Elle mord en rêvant ses lèvres de carmin.
Chez la noire matrone, après lent examen.
Elle a choisi du musc, une horloge qui vibre.
Des bonbons et, merveille! un éventail en fibre
De lotus, dont se pare et s'anime sa main.
Sur sa coiffure folle et luisante se juche
Un bizarre ornement en forme de perruche.
Dont sourit le passant qui regarde, ébahi!
Madame « Lilas Bleu » s'ennuie; elle s'arrête
Un instant sur la place où l'on coupe une tête...
Puis va prendre le thé chez son vieux Koutaï !
L'Ame brûlante
Silence
Nous nous taisions : c'était l'heure troublante et chaude
Où le soleil frémit sur les rideaux croisés,
L'heure lourde où l'amour, dans l'air assoupi, rôde...
Une rose effeuillait ses parfums apaisés.
Vous ne me disiez rien de vos tristes pensées,
Je ne vous disais rien de mes amers chagrins,
Mais le temps s'écoulait entre nos mains pressées,
Comme un collier de deuil dont on compte les grains.
Nous nous taisions, penchés sur le silence tendre ;
Une caresse errait en cette obscurité,
Et je sentais mon âme éperdument se tendre
Vers votre âme tremblante, éprise de clarté !
L'arôme de la fleur passait, tel un sourire ;
La chambre s'emplissait d'espoir et de regret :
Nous pensions les mots doux que nous n'osions pas dire
Nous nous taisions, gardant chacun notre secret...
silence ! c'était l'heure troublante et chaude
Où le soleil frémit sur les rideaux croisés,
L'heure lourde où l'amour, dans l'air assoupi, rôde...
Une rose effeuillait ses parfums apaisés.
Bibliographie:
- Grisailles et Pastels, Lemerre, Paris, 1896.
- Les Heures aimées, Lemerre, Paris, 1900.
- L'Ame Brûlante :(couronné par l'Académie française), Perrin et Cie, Paris, 1905.
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