Mancel (Sabine) ? -?
Sabine Mancel
Chansons enfantines mises en musique par Grovlez
FRAGMENT DE « DEVANT LA MER »
Matin
Quand le soleil surgit, ses obliques rayons
Glissent sur l'herbe rase en lumineux sillons,
Ou, tamisés au vol par un tamaris frêle,
Allongent sur le sable une ombre fine et grêle.
Le ciel est d'un gris pâle, et, sur l'îlot lointain,
Qui se détache en clair dans l'air pur du matin,
On voit étinceler le blanc pilier du phare ;
Une mouette pêche, et tout à coup s'effare,
Et fuit, la proie au bec, devant un goéland :
Le ravisseur voudrait ce poisson scintillant
Qui palpite... La proie est en vain disputée,
Et, du ciel bleu, retombe en la mer argentée;
Les vagues au rivage ont un murmure doux,
Et sur les rochers plats, modelés en tons roux,
S'en viennent arrondir leurs flots bordés de neige ;
Une barque a passé : par un adroit manège.
Sa voile a su capter la puissance du vent,
Et, rougeâtre, sur l'eau met un reflet mouvant,
Car le soleil s'élève, et la mer s'illumine
Au passage du roi qui dans l'azur chemine,
Radieux, allumant comme un vivant éclair
Aux facettes des flots, ces frissons de là mer.
L'année des poètes (Gallica)
La chanson du travail
Au gré de ma fantaisie
Viens, dans la forme choisie,
Viens, dur métal, te plier.
Or, fer, cuivre,
Viens revivre
Soc, statue, aimant, levier.
Lin flexible, laine, soie,
Sur mes doigts de fer déploie
Tes longs fils mêlés ou seuls ;
Rude ou lisse,
Moi, je tisse
Les langes et les linceuls.
Débris qu'on jette à la hotte,
Viens, chiffon ou papillotte,
Sois papier à mon signal...
O pensée,
Cours, lancée
Dans le livre ou le journal !
Viens, éclair ! quitte la nue !
De ta substance inconnue
J'ai fait mon souple valet :
La parole,
Par lui, vole
En tous lieux, dès qu'il me plaît.
Tu suis, ô Nature altière,
Le plan qu'avec la matière
La Science a concerté !
L'homme ordonne :
Je lui donne
L'or, la paix, la liberté.
L'année des poètes (1891) Gallica
BRIC-A-BRAC
Pour mieux embellir nos salons
Nous imitons les philosophes ;
Nous entassons vieilles étoffes,
Vieux cuirs, vieux coffrets, vieux galons.
C'est la mode. Au fond de sa niche,
Comme une araignée en un coin,
Le vieux marchand flaire de loin
L'acheteuse crédule et riche ;
Il l'attire, l'air engageant,
Lui montre une ancienne défroque,
Un étrange débris, qu'il troque
Contre du bel et bon argent.
Madame emporte son emplette
Comme un trésor ? trésor fané ?
Dans son manchon enrubanné
Tout parfumé de violette.
Ce trésor, ? couleur potiron, ?
Est un bizarre et vieux corsage ;
En dépit du temps, de l'usage,
La soie a l'éclat du chaudron.
L'année des poètes (vol 1) Gallica
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