Bilitis (Pierre Louÿs) 1870-1925
Bilitis
Mystification littéraire de Pierre Louÿs
1870-1925
Les Chansons de Bilitis furent publiés en 1894 : il s'agit prétendument d'une traduction due à Pierre Louÿs de l'œuvre de cette poétesse antique. L'ouvrage est précédé d'une Vie de Bilitis, retracée par le traducteur et suivi de plusieurs pages de notes.
Bilitis serait une contemporaine et rivale de Sappho, jeune grecque de Turquie vivant sur l'île de Lesbos au vie siècle av. J.‑C., Pierre Louÿs lui attribua des poèmes sulfureux et passionnés.
En fait, Bilitis est un personnage fictif qu'il a inventé, et Pierre Louÿs est l'auteur de ce recueil de poèmes en prose ; il y déploie toute son érudition et sa connaissance des textes poétiques grecs... (Début de l'article de Wikipedia sur les Chansons de Bilitis)
Pour en savoir plus
Lire l'article de Wikipedia sur "Les Chansons de Bilitis" 1894)
Lire les poèmes des "Chansons de Bilitis sur Wikisource
Début de la biographie inventée par Pierre Louÿs et placée au début du recueil.
VIE DE BILITIS
Bilitis naquit au commencement du sixième siècle avant notre ère, dans un village de montagnes situé sur les bords du Mélas, vers l’orient de la Pamphylie. Ce pays est grave et triste, assombri par des forêts profondes, dominé par la masse énorme du Taurus ; des sources pétrifiantes sortent de la roche ; de grands lacs salés séjournent sur les hauteurs, et les vallées sont pleines de silence.
Elle était fille d’un Grec et d’une Phénicienne. Elle semble n’avoir pas connu son père, car il n’est mêlé nulle part aux souvenirs de son enfance. Peut-être même était-il mort avant qu’elle ne vînt au monde. Autrement on s’expliquerait mal comment elle porte un nom phénicien que sa mère seule lui put donner.
Les 2 premiers poèmes
Ἁδὺ δέ μοι τὸ μέλισμα. ϰαὶ ἤν σύριγγι μελίσδω
ϰἤν αὐλῷ λαλέω, ϰἤν δώναϰι, ϰἤν πλαγιαύλῳ.
Théocrite.
L’ARBRE
1
Je me suis dévêtue pour monter à un arbre ; mes cuisses nues embrassaient l’écorce lisse et humide ; mes sandales marchaient sur les branches.
Tout en haut, mais encore sous les feuilles et à l’ombre de la chaleur, je me suis mise à cheval sur une fourche écartée en balançant mes pieds dans le vide.
Il avait plu. Des gouttes d’eau tombaient et coulaient sur ma peau. Mes mains étaient tachées de mousse, et mes orteils étaient rouges, à cause des fleurs écrasées.
Je sentais le bel arbre vivre quand le vent passait au travers ; alors je serrais mes jambes davantage et j’appliquais mes lèvres ouvertes sur la nuque chevelue d’un rameau.
CHANT PASTORAL
2
Il faut chanter un chant pastoral, invoquer Pan, dieu du vent d’été. Je garde mon troupeau et Sélénis le sien, à l’ombre ronde d’un olivier qui tremble.
Sélénis est couchée sur le pré. Elle se lève et court, ou cherche des cigales, ou cueille des fleurs avec des herbes, ou lave son visage dans l’eau fraîche du ruisseau.
Moi, j’arrache la laine au dos blond des moutons pour en garnir ma quenouille, et je file. Les heures sont lentes. Un aigle passe dans le ciel.
L’ombre tourne : changeons de place la corbeille de figues et la jarre de lait. Il faut chanter un chant pastoral, invoquer Pan, dieu du vent d’été.
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