Chabrier-Rieder (Violette) début XXème)
Violette Rieder
(?-?)
(Début XXème)
Mercure de France, 1 mai 1933: femme Eve...
Le Mercure de France, 16 décembre 1909
(Gallica)
Nocturne
Tais-toi. Le soir est doux sur les roses fanées,
Sur l'étang qui s'allonge entre les saules gris.
Livre à mes doigts ta main, chère à mon coeur épris,
Et tous deux saluons nos anciennes journées.
En longue théorie et la main dans la main,
Regarde-les surgir de l'ombre violette.
Chacune en approchant incline un peu la tête,
Sourit, et disparaît au détour du chemin.
Les reconnais-tu bien? Aux plis de leur tunique
Flotte encor le parfum qui s'exhale de toi
Et le reflet pâli de nos anciens émois
Persiste en leur regard joyeux, tendre ou tragique.
La dernière s'efface. A l'hrizon lointain
Le cortège voilé des minutes prochaines
dresse dans l'air obscur ses ombres incertaines.
Mais la nuit qui s'abat les dérobe soudain.
Je ne désire pas violer leur mystère.
Que pourrait sur mon coeur, s'il l'arrachait de toi,
Le jour qui vient vers nous? Et s'il te laisse à moi
Quelle heure à tes côtés ne me serait bien chère?
Tout dort. Laisse mon front peser à tes genoux.
Comme un souffle léger, que ta main me caresse.
Parle-moi, maintenant...redis-moi ta tendresse...
Sur le jardin muet, Dieu, que le soir est doux!
Paresse
Viens goûter avec moi la douceur d'être lasse,
Inerte et paresseuse et de dire à voix basse
Des mots indifférents que l'on n'achève pas.
Sur les sentiers humains nous entendrons des pas,
Les pas vains et fiévreux d'une race éphémère
Qui déchire sa vie aux ongles des chimères,
Au néant éternel heurte son front obtus
Et croit que les destins valent d'être vécus.
Le jardin où je veux cacher notre paresse
Est un lieu calme et tendre ainsi qu'une caresse,
Et que trop de langueur a rendu douloureux.
La mousse a recouvert le tronc des arbres creux,
La factice rocaille où pleure une cascade
Et les marbres brisés sous les vertes arcades.
Sous un cytise blond, entre les jaunes fleurs,
Pan, narquois et lascif, érige sa blancheur.
Au pied du socle pur fusent des capucines
Dont l'éclat fauve rend les grappes de glycines
- Lourdes de sucre doux, d'aromes et d'été -
Plus suaves encor. L'oeillet déchiqueté,
Tremblant comme un bonheur secret et trop intense,
D'un parfum de cannelle embaume le silence.
Les ruines d'un vieux mur s'étoilent de jasmin.
La voix d'un clavecin rôde dans le jardin
Douce et voilée ainsi qu'un crépuscule pâle,
Si poignante pourtant que, comme une rafale,
Elle envahit, étreint et ravage le coeur.
Et cette voix, vibrant sous le cytise en fleur,
Est l'âme du jardin où gît notre paresse,
Ivre de volupté, d'angoisse et de tendresse.
Jalousie
Le Mercure de France, 1er mai 1933
(Gallica)
La Muse Française, 1938
Article paru dans
La Muse Française, 1938
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