Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Citations diverses (Réserve)

Citations diverses

 

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Roland Barthes

 

dans le rôle peu glorieux

 

de censeur masculin des femmes

 

 

 

   "Pour ne parler que de la Poésie moderne... celle bien entendu d'Apollinaire, et non de Mme Burnat-Provins..." Barthes range sur le ton du mépris, et par deux fois, Marguerite Burnat-Provins aux côtés de Minou Drouet.

 

 

 

   "Une femme a bien exprimé cette fonction superficiellement émancipée et profondément prudente de la "sensibilité" intimiste: Mme de Noailles, qui (coïncidence!) a préfacé en son temps les poèmes d'une autre enfant "géniale" , Sabine Sicaud, morte à quatorze ans."

 

(Relire avec attention l'article "Minou Drouet" de Mythologies (1957) où les propos de l'auteur confinent à la misogynie)

 

 

 

   Il est  tout de même curieux de voir Roland Barthes refuser un prénom à ces deux femmes, tout en les assignant à l'enfance. Sa voix, autorisée par des préjugés toujours en vigueur dans les années 50, retombe dans une présentation "mythologique" de la femme et redonne du lustre à la prétention masculine de considérer les femmes poètes comme des êtres immatures, égocentriques, marqués par leur genre. Leur fonction sociale reste d'être "la femme de...".

 

 

 

  L'explication est peut-être à chercher dans cette petite parenthèse du "roland Barthes par roland Barthes", p. 16: "(dans ces deux grandes familles, le discours était aux femmes. Matriarcat?...)". Il parle évidemment de ses deux familles à lui.

 

 

 

 

 

Il faut ajouter, à sa décharge, que Barthes regrettera sa sévérité vis-à-vis de Minou Drouet:

 

"J'ai dû ignorer en elle, sous le mythe dont on l'embarrasse, comme une possibilité tendre, ouverte. Il n'est jamais bon de parler contre une petite fille.", Mythologies, , p. 256, en note.

 

 

 

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Lire un article très éclairant de Florence Gauthier concernant

 

 

 

 

 

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 Pourcentages de femmes représentées dans diverses anthologies françaises et anglaises en 2006

 

 

 

 

 (Pourcentage, encore aujourd'hui, souvent proche de 3 à 4%)

 

   Pour actualiser ce travail, on peut commencer par faire le compte des ouvrages féminins présents sur les rayons de poésie d'une quelconque librairie ou bibliothèque, ou encore consulter des anthologies du type "Les plus beaux poèmes d'amour de la littérature". Les hommes seraient-ils les seuls à aimer et à l'écrire?

 

 

 

 

 

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Les     poétesses  en  action

 

2011 (05-11) - Barheïn: Ayat al Kurmouzi, une jeune poétesse en prison  DOIGT 26.jpg

2014 (05-11) - Plus de 40 poétesses au 7ème festival de Constantine  DOIGT 26.jpg

 

 

 

 

 

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"L'inestimable contribution des poétesses françaises à la littérature universelle"
   Les manuels scolaires, nombre d'anthologies et de revues peuvent donner l'impression que la création poétique a surtout été, en France, le fait des hommes. Il n'en est rien! Du Moyen-Age jusqu'à nos jours de grandes voix féminines se sont fait entendre. On peut se demander pourquoi la plupart ont été oubliées. Pourtant, comme le souligne Veronica Martinez Lira dans sa superbe anthologie de poésie féminine française parue au Mexique en 2011, " La contribución femenina a la herencia universal de las letras en lengua francesa es innegable". Je suis parti à la recherche systématique de tous ces noms oubliés, j'ai voulu lire les textes, j'ai découvert des poèmes qui m'ont bouleversé et j'ai voulu partager ces trésors.
 

 Charles Asselineau (19ème siècle)

 

 "En France, constatons-le, la Poésie est un art d'hommes: une demoiselle, des mieux élevées et du meilleur monde, ,ne craint pas de s'exposer au piano devant une foule...Mais publier des vers chez un éditeur, c'est-à-dire faire vendre un livre dans une boutique à une demie-lieue de chez soi, cela ne se fait pas, cela est mal vu."

 

Préface à la deuxième édition des Rayons perdus" de Louisa Siefert, 1869

 

 

 

 

Otto Weininger

 

   "La femme est par essence sans nom et cela parce qu'elle manque, par nature, de personnalité.

(Otto Weininger, cité par Pierre Bourdieu dans "La Domination masculine", éd du Seuil, p.86)

 
 Daniel Stern (Mme d'Agoult)
Eve 
    Le Tout-Puissant avait dit au couple humain, faible et ignorant, mais heureux et immortel: "Tu ne mangeras point de l'arbre de la science, ou bien tu mourras."
    L'homme se résigne à cette inactive et insensible félicité; mais la femme, écoutant en elle-même la voix de l'esprit de liberté, accepte le défi. Elle préfère la douleur à l'ignorance, la mort à l'esclavage. A tout péril, elle saisit d'une main hardie le fruit défendu; elle entraîne l'homme avec elle dans sa noble rebellion.
    Le Tout-Puissant les châtie l'un et l'autre, les bannit, les voue à la mort.
 La mère des hommes est condamnée à enfanter dans les larmes. Eve reste à jamais, pour sa triste et fière postérité, la personnification glorieuse et maudite de l'affranchissement du génie humain.
  Cette genèse est l'histoire de toutes les révolutions.
      Daniel Stern (Comtesse de Flavigny ou Marie d'Agoult) compagne de Franz Liszt de 1835 à 1839.

 Marie-Louise Boudat (ver 1930)
(Je me lève)
 
 Je me lève. Je sors des millénaires nuits,
Du soleil plein la gorge et les bras lourds de fruits,
Et le goût mélangé des désirs sur ma bouche.
O femme, d'un seul jet sans cassure et farouche,
L'abîme de mes bras fermé sur mes amants!
Je me vois, magnifique en mes prolongements,
D'hier et de demain enveloppant l'espace!
Marie-Louise Boudat (dans le Divan, 1936)

 Madeleine des Roches (16ème siècle)
 
 Nos parents ont, de louable coutume,
Pour nous tollir (retirer)l'usage de raison,
De nous tenir closes dans la maison,
Et nous donner le fuseau pour la plume...
Il me suffit aux hommes faire voir
Combien leurs lois nous font de violence...
 

Comtesse de Vidampierre à la Comtesse de Beauharnais (fin 18ème)
 
Du Sexe même qu'il caresse
J'observe que l'homme est jaloux;
Il n'aime en nous que la faiblesse;
N'écris point, ou rampe sans cesse,
Ils seront tous à tes genoux.                          
 

Mlle Deshoulières (18ème): Le bonheur ou la gloire
Préface de la fille de Mme Deshoulières pour la publication posthume des oeuvres de sa mère

  Encore la gloire
 

"Gloire j'aurai d'heureuse récompense,

Si puis atteindre à celles qui seront

Par leur chef-d'oeuvre en los (louange) toujours vivantes,

Mais tel cuider (penser) serait trop plein d'audace..."

(Jeanne d'Albret, 16ème siècle)
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Quand je ne vivrai plus, qui recevra la gloire
Que je dois exiger de la postérité?
(Mme de Lauvergne, 1680)
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L'homme se perd dans l'avenir;
Il s'immole à sa renommée:
Qu'on est fou de vouloir courir
Après une vaine fumée!
(Marquise D'Antremont, Mme Bourdic-Viot, fin 18ème)
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 "Pour une femme, la gloire est le deuil éclatant du bonheur." 
(Germaine de Staël, début 19ème siècle)
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"Les fleurs que la gloire donne
Ont de l'éclat sans odeur;
Et trop souvent sa couronne
Couvre le front du malheur.
(Marceline Desbordes-Valmore, Almanach des Muses, 1821)
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"Je demande au Ciel qu'il ne sépare jamais pour vous le bonheur de la gloire." (Chateaubriand à Louise Colet, 1835)
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"Anaïs, ton sexe ne peut rien aimer ardemment, même la gloire sans qu'il ne lui en coûte le bonheur."
(Adélaïde Dufrénoy, début 19ème siècle)
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"Quoi! pas un de mes jours n'a laissé de mémoire?
Quoi! mon nom reste encor dans l'ombre enseveli?"
(Elisa Mercoeur, début 19ème siècle)
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Au Pinde, comme ailleurs, les hommes sont jaloux.

Il faut partout céder, et borner tous nos goûts

A briguer de leur choix la gloire passagère.

(Philippine de Vannoz, début 19ème)

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Je laisse à d'autres ce qui bout

Dans ta marmite, ô Gloire. Une oeuvre

Est comme un fief. Un vrai manoeuvre

Bâtit son ciel, seul, et debout.

                                                                 Jeanne Dortzal (vers 1930)


 

Voici un texte étonnant de

 

la Marquise d'Antremont (Mme Bourdic-Viot)

 

qui répond à un éditeur la menaçant de représailles symboliques si (parce que?) elle refuse d'éditer ses poèmes:

 

 

 

 "L'homme se perd dans l'avenir;

 

Il s'immole à sa renommée:

 

Qu'on est fou de vouloir courir

 

Après une vaine fumée..."

 

 

 

 


 

Minou Drouet

 

Jean Cocteau et Roland Barthes en ont dit beaucoup de mal. André Breton a défendu les poèmes, sans se prononcer sur l'auteure et...

 

 

 

Madeleine Renaud les a interprétés:

 

 

 

1- Les mains   

 

2 - Je n'avais qu'un ami

 

 

 

 

 

L'inestimable contribution des poétesses françaises à la littérature universelle

 

   Les manuels scolaires, nombre d'anthologies et de revues peuvent donner l'impression que la création poétique a surtout été, en France, le fait des hommes. Il n'en est rien! Du Moyen-Age jusqu'à nos jours de grandes voix féminines se sont fait entendre. On peut se demander pourquoi la plupart ont été oubliées. Pourtant, comme le souligne Veronica Martinez Lira dans sa superbe anthologie de poésie féminine française parue au Mexique en 2011, " La contribución femenina a la herencia universal de las letras en lengua francesa es innegable". Je suis parti à la recherche systématique de tous ces noms oubliés, j'ai voulu lire les textes, j'ai découvert des poèmes qui m'ont bouleversé et j'ai voulu partager ces trésors.

 


 

 

 Морис Куран  
"Je l'ai réduite à rien" 

 

 

 

 Evelyne Désorméry (Début XIXème siècle)

 

 

 

 Comme un frêle rameau se détache de l'arbre

 

Et meurt inaperçu dans l'ombre des coteaux,

 

Mon nom sevré d'éclat s'éteindra sous le marbre

 

Qui cèle les tombeaux.  

 

(Adieux à la vie)

 

 

 

Delarue-Mardrus (Début XXème siècle)
Je donne rendez-vous, dans l'avenir lointain,
A ceux qui liront mes poèmes;
Car j'y aurai laissé, morte, mes moelles même,
A l'écart du temps que je n'ai pas atteint. 
 
Constance Salm-Dick (début XIXème siècle)

Venez, et faites-voir à la postérité

Qu'il est aussi pour nous une immortalité.

 

 

***

 

 

 

    Non! la poésie féminine n'a pas été "réduite à rien", comme le craignait à la fin de sa vie le poète Морис Куран parlant alors de son épouse dont il avait découvert sur le tard de modestes écrits. Pourtant bien que les études universitaires se soient multipliées, les textes restent le plus souvent inaccessibles. Les anthologies consacrées aux femmes ont mauvaise presse: on sait que l'accent mis sur le genre a des effets pervers. Résultat, il est peut-être plus difficile aujourd'hui d'accéder aux oeuvres "féminines".

 

  Au même moment, les sites d'archives numériques tels que Gallica, Archive.org, et bien d'autres, font ressurgir aujourd'hui dans un joyeux désordre des centaines d'ouvrages tombés dans l'oubli, montrant que les femmes, loin de rester passives et inactives dans l'ombre des génies masculins, n'ont cessé de protester contre la prison domestique (parfois dorée) où elles étaient cantonnées. Leurs oeuvres ne sont pas toujours abouties; comment auraient-elles pu rivaliser avec les hommes? La "création" était pour elles une véritable course d'obstacles.  La fameuse universalité dont se revendique la création artistique n'est qu'un jeu de dupes, dont les règles ont été édictées par l'un des deux joueurs, à son avantage. Avant donc d´étudier et de formuler des hypothèses, j'ai ressenti le besoin de lire leurs oeuvres.

 

  On aimerait croire que la situation s'est améliorée. Il suffit pourtant d'ouvrir les yeux: ainsi, le catalogue de la petite collection Poésie/Gallimard (NRF) ne propose que de rares noms féminins sur les  150 consacrés à la poésie française, et encore faut-il compter parmi eux Louise Labé dont on n'est plus du tout sûr qu'elle soit une femme (Pour en savoir plus, consulter Poezibao). Comment mieux contredire la phrase de Sapphô qui sert abusivement de titre au pauvre volume consacré aux femmes dans la même collection: "Quelqu'un plus tard se souviendra de nous"? Pour se convaincre du contraire, il suffit encore de feuilleter les 2 volumes concernant le 19ème siècle. Le bilan est consternant. Où sont les progrès réalisés depuis les premières anthologies ou les premiers dictionnaires de littérature féminine du 18ème, du 19ème siècle et de la première partie du XXème siècle? Il semble que ces ouvrages ne soient plus les bienvenus. L'impression qui domine est celle d'une regression. Les sympathiques journées du type "Couleur femmes" (2011) n'apportent qu'un lot de consolation qui ne contribue en rien à la reconnaissance en profondeur d'un patrimoine féminin. Maria Krysinska et Makhali-Phal sont rééditées aux Etats-Unis. Les grandes anthologies de poésie féminine de langue française sont désormais bilingues: "French women poets of nine centuries" (français/anglais), "Constelación de poetas francesas" (français/espagnol). Cette dernière anthologie vient de paraître ...à Mexico! La tradition (Briquet, Keralio,Busoni,Séché, Béalu, Mouline...) se serait-elle perdue?

 

  Ce blog veut profiter des nouveaux outils numériques pour retrouver ces voix effacées et introduire à la lecture de ces oeuvres ignorées. 3 niveaux de consultation sont possibles:

 

1 - la page d'accueil est là pour sensibiliser le passant d'Internet.

 

2 - Le colonne de gauche propose une liste de près de 300 noms. Ces pages permettent de donner une première idée de l'écriture de chacune de ces auteures.

 

3 - On peut enfin trouver dans les pages intitulées "Sites d'intérêt" ou "PDF" des liens directs vers les oeuvres numérisées sur les sites Gallica, Archive.org et quelques autres. 

 

 

 


 

 


 

 

Site international consacré aux

 

European women writers in history

 


 

 

 

 


 

 

 

Ecouter les enregistrements audio

 

 

(N'hésitez pas à m'envoyer des fichiers mp3 si l'enregistrement de tel ou tel poème vous tente!)

 


 

 

Soeur Anne de Marquets (16ème siècle)

 

(Fin d'un sonnet adressé aux hommes)

 

 

 

De nous blasonner donc cessez dorénavant:

 

N'enviez nos honneurs, contentez-vous des vôtres...

 

 

 


 

 Claude Cahun (début XXème):

 

"Pardonnez-leur, car ils ne savent pas ce qu'ils font!"

 

 

 

   Je compris vite l'horrible guet-apens: peintres, écrivains, sculpteurs même, ils copiaient la vie. Au lieu de la tromper, cette éternelle épouse! c'était à qui lui serait le plus fidèle. Pouvais-je admirer leurs chromos, moi qui déjà n'aimais point le modèle?

 

   Se croyant tous destructeurs, bâtisseurs, méconnus, maudits, parricides, incendiaires - comme ils s'intimident eux-mêmes! comme ils sont, devant ce qu'ils nomment: la Gloire, des enfants sages, et soumis, et battus! - comme ils manquent d'audace!...

 

Claude Cahun (Lucy Schwob) , dans "Salomé la sceptique" (Les Héroïnes, 1925)

 

 

 


 

Le voile islamique vu par Renée de Brimont?

 

(Alger, 1914. Elle s'adresse fictivement à une petite fille voilée. Extraits)

 

 

 

Vous ignorez , grasse petite fille,

 

vous que des jeux puérils satisfont

 

mais qui régnez obscurément, selon le rite,

 

vous ignorez notre Occident cosmopolite,

 

notre nostalgie et nos ciels brumeux,

 

nos hâtes, nos secrets, nos jeux,

 

ce que nous portons de rudesse et de flamme,

 

et nos laideurs, et nos beautés,

 

et tout ce que la liberté

 

a fait de nous, les femmes!

 

Vous ignorez, vous ignorez ce qui nous touche...

 

pourtant, sachez-le, le voile est en nous

 

que vous gardez, ô ma soeur, sur la bouche!

 

                                                                   Mirages, 1914

 

 

 

Ecoutez Renée de Brimont disant, en 1912, un autre de ses poèmes,

 

"Rien ne sert"

 

(Archives de la parole, Gallica)

 


 


 

Pensée(s) d'Adorno au carrefour de la poésie et de la critique sociale
 
" La femme qui s'éprouve comme une blessure lorsqu'elle saigne, sait plus d'elle-même que celle qui s'imagine être une fleur parce que cela convient à son mari."
 
"La femme elle-même n'est-elle pas le produit du fouet? Supprimer cette fabrication artificielle signifierait enfin libérer la nature. La glorification du caractère féminin implique l'humiliation de toutes celles qui le possèdent."
 
Minima moralia 59
 

 

 Mme Ackermann: Journal, 3 août 1864

 

Quelle trace?

 

Je suis quelquefois effrayée en songeant combien il s'en est fallu de peu que je ne laissasse aucune trace de mon passage. Que la barque s'engloutisse, mais qu'il reste un sillage.

 



03/09/2012
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