Fourcade (Claude) 19..-1983
Claude Fourcade
19..-1983
Publié dans le Divan (1929)
Le Divan 1931
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Poème publié sur la page "Rienquedeschats"
Jasmins
Dans le cimetière où tu t'envolais,
Compagne d'exil, colombe innocente,
Dans le cimetière où les feux follets,
Ces âmes des morts que le vent tourmente,
Venaient nous surprendre au bord des chemins,
Dans le cimetière aux ombres heureuses
Je reconnaîtrai de loin ces jasmins
Dont vous parfumiez vos doigts, ô charmeuse,
Et je vous suivrai comme aux anciens jours
Au-delà du monde et de la pensée
Jusqu'à l'âpre autel où l'urne est dressée
Qui doit consacrer mes tristes amours.
Pavots
Visage de lumière à qui tout semblait dire:
"La vie est un chemin paisible et parfumé;
Au loin t'attend l'amour avec le bien-aimé
Dont nul autre avant toi n'aura vu le sourire."
Visage de lumière et de l'eau sombre aussi,
A quoi bon t'égarer parmi les lauriers-roses
Puisqu'au plus beau du rêve étrange où tu reposes,
Il n'est que pavot noir, anémone et souci?
Pensées
Prends cette rose claire et ces sombres pensées
La fleur du songe unie aux fleurs du souvenir;
C'est la seule rançon qui doit t'appartenir
Pour les larmes d'amour que je n'ai pas versées.
Jette au vent des jardins tous les bouquets reçus
Et qui ne t'ont parlé qu'un frivole langage,
Mais pose sur ton coeur celui-ci comme un gage
Des tendres repentirs que tu n'as jamais sus.
Iris
La lumière décline et la forêt s'endort;
Tous les parfums du soir vont te tendre leur piège,
Mais un visage ardent t'escorte et te protège
Jusqu'à l'étang jonché de calmes iris d'or.
Une barque enlisée est là, près du rivage;
Son banc sans avirons, n'attend plus de rameur,
Pourtant tu lui sais gré d'être le témoignage
Du mal mystérieux où s'épuise ton coeur.
Anémones sylvies
Pour cueillir les bouquets d'anémones sylvies,
Reviens au bois malgré ton courage hésitant;
Un miracle d'avril peut-être nous attend
Avec la solitude et l'ombre, tes amies.
Pour qui cherche vraiment trace de ses amours
Il n'est pas un parfum, pas un chant, pas une aile
Qui ne puisse empêcher l'écho resté fidèle,
Lorsqu'on dit: "Jamais plus" de répondre: "Toujours!"
Ancolies
Bouquet de nos amours, souples fleurs étoilées
Qui tremblez sur le bord des lointaines vallées
Dès que s'endort le bois par octobre jauni,
Bouquet de nos amours au bord de l'infini
Posé comme un témoin du rêve le plus tendre,
Un destin sans égal vous garde de la cendre
Où vont tous les bouquets respirés à vingt ans;
Un destin généreux pendant quelques instants
Préserve votre éclat si rare et votre grâce,
Magique souvenir que nul autre n'efface,
Lumière de nos coeurs hors de la nuit des temps!
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L'hallali
Il y avait les eaux dormantes sous les branches
Et les sentiers jaunis par l'arrière-saison;
Il y avait le ciel sans rêve et la maison
Du garde où se mourait la fille aux mains trop blanches;
Il y avait le chant d'un oiseau de forêt
Qui s'éloignait, là-bas, près des terres en friche;
Il y avait le sang répandu d'une biche
Et déjà, dans ton coeur, tout l'amour qui pleurait.
La curée
Un rayon de soleil s'attarde sur les chaumes,
Le pavot de la mort sous la croix refleurit,
Dans la chambre aux miroirs où sombra son esprit
Le prince désoeuvré convoque ses fantômes;
Et toi qui t'en vas seul, sans flèche ni carquois,
Comprimant des deux mains ton éternelle plais,
Lorsque tu sortiras de la pâle futaie
Tout le sang de ton coeur aura rougi les bois.
Les sombres vallées, 1957
Sologne
Cette étrange forêt, ses ombres, ses mystères
Pourquoi les craindrais-tu, mon frère voyageur ?
Tu connais les parfums du sol et la rumeur
Du vent qui vient parfois des marais solitaires ;
Tu comprends le regard des bêtes à l'affût
Parmi le craquement des mourantes verdures,
Les coups de feu bruyants, les clameurs, les murmures,
Les derniers sons du cor, le retour, ce qu'il fut...
Ce qu'il fut au château pour la brillante escorte
Quand, avec ses cheveux si beaux, ses yeux si doux,
On découvrit dans le salon de Rendez-vous,
Au pied de son miroir, la jeune fille morte.
Pourquoi dans les taillis ne point perdre tes pas
Malgré l'heure tardive, ô voyageur mon frère ?
Cette étrange forêt, ses ombres, ses mystères,
Cachent mes souvenirs qui ne tarissent pas...
Article paru dans La Muse Française 1938
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