Lamartine (Alix de) 1766-1829
Alix de Lamartine
1766-1829
(mère du poète Alphonse de Lamartine. Elle a laissé un journal intime (1801-1829), publié plus tard par son fils sous le titre "Le Manuscrit de ma mère".
Rousseau et son quatrième enfant
L'extrait suivant (p. 121) est consacré à Jean-Jacques Rousseau, et à la notion de "génie"
Je consigne ici une anecdote bien étrange sur J. J. Rousseau et la maréchale de Luxembourg, avec laquelle ma mère était fort liée. La maréchale de Luxembourg, très amie de Rousseau, sut que la femme avec laquelle il vivait était enceinte. Elle craignit que Rousseau ne voulût jeter, comme il avait déjà fait trois fois cet enfant, aux Enfants trouvés. Elle alla trouver M. Tronchin, de Genève, ami particulier de J. J. Rousseau, et le pria instamment de lui faire apporter cet enfant dont elle prendrait soin. M. Tronchin en parla à Rousseau, qui parut y donner son consentement. Il le dit aussi à la mère, qui fut ivre de joie. Aussitôt qu'elle fut accouchée, cette pauvre femme fit avertir Tronchin. Il vint : il vit un bel enfant qui était un garçon plein de vie. Il prit l'heure avec la mère pour revenir e lendemain chercher l'enfant ;mais à minuit Rousseau, vêtu d'un manteau de couleur sombre, s'approcha du lit de l'accouchée, et, malgré ses cris, emporta lui-même son fils pour le perdre, sans marque de reconnaissance, dans un hospice ! Voilà l'homme dont tant de gens exaltent la sensibilité ! disait ma mère. Moi, je dis : Voilà un insensé dont la tête malade a égaré le coeur ! Hélas ! le génie n'est souvent, quand il ne repose pas sur le bon sens, qu'un premier accès de délire ! Le Tasse et Rousseau en sont la preuve. Acceptons le génie si Dieu le donne, mais souhaitons le bon sens à nos enfants !
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