Lasnier (Rina)
Rina Lasnier
1915 (ou 1910) - 1997
(Les manuscrits de cette poétesse sont en ligne sur le site
"Bibliothèque et Archives Nationales du Québec")
Page en construction
Les sourds
Ils ont étouffé toutes les sarcelles
Pour ne pas entendre le cri des eaux ;
Ils ont lapidé les sources et les ruisseaux
Afin de mieux coucher le chant sous terre.
Ils n'ont pas voulu entendre la clameur
Des eaux vives au rocher rassasié ;
Ils ont laissé mourir le troupeau de leur coeur
Sur les sables de leur incrédulité.
Ressemblance
Comment te réveilleras-tu de moi
Au jour où tu seras roi
De ton royaume et de tes archipels,
Chassant les oiseaux de mes nocturnes appels
Pour qu'ils cessent de disperser la mer,
De contraindre ton âme à leurs îles éphémères ?
Comment te réveilleras-tu de mon absence
Au jour entre les jours où mon anneau
Ne sera plus à moi comme laine au fuseau,
Quand tu ne voudras plus de l'accoutumance
Du baiser mis à fermenter sous les larmes,
Quand le sang ne sera plus le vin panique de l'âme ?
Il y aura un jour où les jours dureront,
Un soir où tous les soirs seront détruits
Ce sera le temps où l'âme aura fini
De dépasser l'amour comme mât sur horizon ;
Comment retrouveras-tu notre alliance
Si tu t'es perdu dans une autre ressemblance ?
Les défricheurs
Un trou dans le dos du ciel
Un ravage au ventre la terre
Ils ont au sang le défi de l'arbre dressé
Et dans les reins le poids de l'arbre dravé
L'arbre croule sous ses bannières de feuilles
Le défriché fermente comme un pétrin d'or
Le défriché bouillonne de lumière neuve
Le vain des vivants et alaire des morts
L'arbre était le sceptre d'un domaine amer
L'arbre franc et un à un adversaire
L'ombre fermait la terre mieux qu'une dalle
La souche culbutée ouvre enfin l'héritage
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