Moulin (Jeanine) 1912-1998
Jeanine Moulin
1912-1998
Poème emprunté à la page http://www.paperblog.fr/2712695/fragonard-jeanine-moulin/
(Elle n'avait pas tout dit)
Elle n’avait pas tout dit:
La caresse de sa hanche
Sur une main avide,
Ses lèvres butinées
Par la gourmandise d’un baiser.
Elle n’avait pas tout dit:
Le chant de sa chevelure
Qui lui faisait tourner la tête
Et déployer les bras en croix
Dans l’attente d’un sacrifice délectable.
Elle n’avait pas tout dit:
Le défi lancé après l’offrande,
Quand le bout de son pied de satin
Étoilé d’écailles de roses
Pointait insolemment entre les draps défaits.
Trois poèmes retenus de l'anthologie de Jeanine Moulin
Dialogue
A Maurice Chapelain
On mourra, de quoi?
D'avoir vécu, pardi!
Et de quoi aura-t-on vécu?
D'attendre qu'on meure, que diable!
Alors, á quoi tout cela rimait-il?
Mais à rien, il n'y a que la poésie qui rime.
Et encore...
Quand le réveil sonna
Quand le réveil sonna, ce n'était plus le temps,
Plus le temps de guérir, plus le temps de mourir.
Quand le réveil sonna, la vie donnait sa langue
Au chat et les souliers marchaient au pas, déjà.
Quand le réveil sonna, au seuil des forêts noires,
Le coucou hoquetait comme un clown essouflé.
C'etait l'heure, à Clichy, des mimes dérisoires,
Des foules en va-et-vient, de la gare au boulevard.
Quand le réveil sonna, ma robe était perdue
Et jétais sans printemps pour coudre les lambeaux,
La marchande de pleurs, rue de Seine, était nue,
Rue Mazarine, un sourd n'entendait plus son coeur.
Et le vent dans Paris se mêlait aux orties
Qu'on ne voit pas piquer les talons du rôdeur,
Quand, mal-aimé déchu, il se gave de leurres.
Quand le réveil sonna, je cherchai la guérite
Où enfermer ma voix, horse-guard sans bonnet.
J'avais faim d'un gâteau, peur du vent, soif du vide,
Je voulais un repas où l'on partage et prie,
Un coude à coude pour chauffer le sang à blanc,
Une main à main pour rompre un pain de confidences.
Quand le réveil sonna, las! Il n'était plus l'heure
Que d'être seul en soi.
Midi était passé.
Fallait-il commander un festin, une vie?
Mais il n'était plus temps d'accrocher le convive.
Les tables se taisaient, Dieu s'était esquivé.
La pierre à feux, 1968
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 167 autres membres