Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Navarre (Marguerite de) 1492-1549

Marguerite de Navarre

 

(ou Marguerite d'Angoulème

Soeur de François 1er)

1492-1549

 

 

 

Soeur de François 1er 

Marguerites de la Marguerite, 1547

 

 

Un ami vif vint à la dame morte

 

Un ami vif vint à la dame morte,

Et par prière il la cuida tenter
De le vouloir aimer de même sorte,
Puis la pressa jusqu'à la tourmenter ;
Mais mot ne dit, donc, pour se contenter,
Il essaya de l'embrasser au corps.
Contrainte fut la Dame dire alors :
" Je vous requiers, ô Ami importun,
Laissez les morts ensevelir les morts,
Car morte suis pour tous, sinon pour un. "

 


 

J'aime une amie entièrement parfaite

J'aime une amie entièrement parfaite, 

Tant que j'en sens satisfait mon désir.
Nature l'a, quant à la beauté, faite
Pour à tout oeil donner parfait plaisir ;
Grâce y a fait son chef d'oeuvre à loisir,
Et les vertus y ont mis leur pouvoir,
Tant que l'ouïr, la hanter et la voir
Sont soeurs témoins de sa perfection :
Un mal y a, c'est qu'elle peut avoir
En corps parfait coeur sans affection.

 

 


 

Plus j'ai d'amour plus j'ai de fâcherie

Plus j'ai d'amour plus j'ai de fâcherie,

Car je n'en vois nulle autre réciproque ;
Plus je me tais et plus je suis marrie,
Car ma mémoire, en pensant, me révoque
Tous mes ennuis, dont souvent je me moque
Devant chacun, pour montrer mon bon sens ;
A mon malheur moi-même me consens,
En le célant, par quoi donc je conclus
Que, pour ôter la douleur que je sens,
Je parlerai mais je n'aimerai plus.

 

 



Elle m'a dit : Par refus ou tourment

Elle m'a dit : "Par refus ou tourment
Je vous ferai laisser votre entreprise."
Mais Amour dit : "Aimez la fermement,
Car à la fin, soit douleur ou surprise,
Par mon moyen vous en ferez la prise,
Et vous rendrai de son corps le vainqueur."
Helas ! Amour, ce m'est trop de faveur,
Mais d'un tel corps ne veux la jouissance,
Sans être aimé ; par quoi frappez son coeur,
Si vous avez hardiesse ou puissance.

 

 


(Les quatre éléments)

 

L'un vit du feu, car toujours est nourri

D'ardente amour, non moins forte qu'honnête;

L'autre de l'eau, car il s'en va péri

Par les ruisseaux qui sortent de sa tête.

Le tiers, à qui toute espérance est prête

De son secours, vit seulement de l'air,

Mais le dernier, qui ne fait que parler

D'aller mourrir, vit de la terre obscure

Je vous requiers, ne me veuillez céler

Lequel de tous plus de douleur endure.

 


François 1er

 

(Rieusseyous Alq, archive.org)

 


 

 

Dans les Annales Politiques et Littéraires du 2 janvier 1910

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03/02/2011
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