Ottenfels (Cécile d'Affry, baronne d'), 1839-1911
Baronne d'Ottenfels
(Cécile d'Affry)
1839 ou 1842-1911
sur le site diesbach.com
Biographie
Dans le Dictionnaire biographique de Gubernatis
- Bouquet de pensées, 1888
Sapho
poème publié dans La Nouvelle Revue (1885-1889)
Aux poètes "quand ils ont vingt ans"
Quand nous aurons fini de gravir les collines
Et de meurtrir nos pieds aux cailloux du chemin,
Quand nous aurons cueilli toutes les églantines
Et déchiré nos mains à toutes leurs épines
Pour en faire un bouquet déjà fané demain...
Quand nous aurons saisi, après leurs ailes nacrées,
Tous les gais papillons voltigeant sur les fleurs,
Et butiné le miel des abeilles dorées,
Et trempé notre lèvre aux sources ignorées
Dont l'onde ne jaillit qu'aux suprêmes hauteurs,
Alors, las de monter, de chercher, de poursuivre,
De moduler des chants que l'on n'écoute pas,
De distiller le philtre où notre coeur s'enivre,
Pour nous-mêmes enfin nous nous mettrons à vivre,
A goûter le repos, seul bonheur d'ici-bas.
Alors, - ô vision trop longtemps caressée! -
Alors, tous ceux que j'aime assis à mon côté,
Sur quelque tiède plage aux vents de mer bercée,
Vivant la même vie et la même pensée,
Nous finirons nos jours comme un beau jour d'été.
Ainsi rêve tout bas le coeur et la sagesse,
Mais le mirage au loin va reculant toujours,
Car cette autre "Sapho", la Muse enchanteresse,
N'a qu'à nous mettre au front sa divine caresse
Pour sceller à jamais nos éternels amours.
En vain, dans nos instants de révolte tardive,
Nous repoussons sa coupe où d'autres ont puisé;
En vain, l'esclave insulte au joug qui le captive,
Sous les doigts de Sapho toute chaîne se rive,
Toute cendre s'allume à son souffle embrasé.
Et son pas triomphant désormais nous entraîne
A travers les sentiers embaumés des forêts,
Ecoutant tout le jour son doux chant de sirène,
Aspirant les parfums, la lumière sereine,
Buvant la poésie et l'ivresse à longs traits.
Ainsi le temps s'écoule et la jeunesse passe,
Vain nuage emporté vers l'azur idéal,
Ainsi la charmeresse autour du coeur s'enlace,
Entre le monde et nous creusant tout un espace,
Vouant notre existence à son culte fatal...
Et c'est quand nous avons tout quitté pour le suivre,
Quand nous touchons peut-être au rivage inconnu,
Qu'à notre isolement la perfide nous livre...
Puis la vie à son tour se ferme comme un livre
Et nous pleurons trop tard de ne l'avoir pas lu...
La Nouvelle Revue, novembre-décembre 1885, p. 400
Le quatre-vingtième
au colonel Huber-Saladin
Si j'allais parcourir la région polaire
Par ces beaux jours d'été qui ne finissent pas.
Pour montre je n'aurais que le cadran solaire
Et le temps sous mes yeux arrêterait ses pas;
Si j'étais née au loin sous le ciel tutélaire,
Où le printemps toujours fait fleurir les lilas,
Sans dresser des saisons l'inutile inventaire.
J'eusse oublié qu'ailleurs la terre a des frimas;
Si j'avais pour ami l'un de ces coeurs d'élite
Où charme, poésie, esprit, talent, mérite,
Ont au travers des ans su garder leur fraîcheur,
Je ne permettrais pas qu'un acte de naissance
Vînt m'indiquer la page où le livre commence,
Le livre toujours neuf qu'a signé le bonheur.
Janvier 1878
En wagon
A Mademoiselle D. Mélégari
Cours à travers les monts, vole à travers la plaine!
Rapide comme un songe, ardente comme un voeu,
Sublime invention de l'industrie humaine,
Fantastique coursier nourri d'air et de feu!
Béni soit aujourd'hui ton souffle qui m'entraîne
Vers les rives en fleurs où dort mon Léman bleu.
Par un beau soir d'été dont la splendeur sereine
Electrise tout être, illumine tout lieu.
Mais hâte-toi de luire, ô soleil sans nuage!
Hâte-toi de chanter tout le long du voyage,
Espoir, gai rossignol que j'emporte en chemin,
Car peut-être un ciel gris pleurera goutte à goutte
Lorsque je reprendrai tristement cette route:
Les jours trop radieux n'ont pas de lendemain.
Songe d'été
(dans l'Année poétique, 1906)
Pastel
(dans Le Correspondant, 1886)
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