Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Poétesses d'expression française (du Moyen-Age au XXème siècle)

Plan (Pauline), instutrice à Marseille: poésies pour les enfants (1916)

Pauline Plan

 

 

(Dans Edouard Petit: de l'école à la guerre, 1916, Gallica) 

"De l'école à la guerre", 1916)

 

 

 

Réveil glorieux

 

 

 

Sublimes, dans le vent libre de notre ALSACE,

 

Drapeaux, vous le saviez qu'un jour vous flotteriez,

 

Que vos pâles couleurs près de nos verts lauriers

 

Chanteraient sous le ciel profond l'hymne de grâce!

 

Drapeaux vous le saviez, et lors vous demeuriez

 

Frémissants dans l'attente et superbes dans l'ombre,

 

Et portant dans vos plis le grand rêve des morts!

 

Drapeaux! l'heure est venue et leurs fils sont plus forts

 

Et leurs coeurs éblouis redoublent de vaillance!

 

Drapeaux! l'heure est venue et la France s'élance,

 

Et voici que soudain vous claquez sous nos murs!

 

Et vous êtes si beaux, et vous êtes si purs,

 

Sacrés de tant d'amour qu'à votre vue on crie,

 

O vous que nos mourants ont rendus à la vie,

 

Vous pour qui vont s'ouvrir tant de pieux tombeaux!

 

Que vous nous arrachez des pleurs, ô fiers drapeaux!

 

Sublimes dans le vent libre de notre ALSACE,

 

Drapeaux, vous le saviez qu'un jour vous flotteriez.

 

Que vos pâles couleurs près de nos verts lauriers

 

Chanteraient sous le ciel profond l'hymne de grâce!

 

Drapeaux, vous le saviez que vous nous vengeriez!

 

 

La Muse du blessé

 

Toi qui consoles et qui charmes,

Qui rêves par les purs chemins,

Et dont les diaphanes mains

Comme un baiser, sèchent les larmes!

 

O Muse! Claire vision!

Amante des nuits étoilées.

Qu'enchante l'ombre des vallées,

Et que grise un premier rayon!

 

O source de joie éternelle,

Impérissable et fraîche fleur!

Cri d'extase! Cri de douleur

Qui nous emportes sur ton aile!

 

Viens bercer de ton divin chant,

O Muse immortelle et chérie,

Les fils vaillants de la Patrie!

Prends ton rythme grave et touchant!

 

Garde, dans des flots d'harmonie,

L'écho sévère du canon...

Des martyrs répète le nom

Avec ta tendresse infinie...

 

Et redis qu'ils seront vainqueurs

Ayant donné toute leur âme!

Que leur sublime et saint flamme

Elève chaque jour nos coeurs!

 

O Muse, apporte l'Espérance

A ceux qui versèrent leur sang!

De ton souffle doux et puissant

Exalte leur noble souffrance!

 

Chante la terre des aïeux,

La terre féconde et si belle,

Et chante que souffrir pour elle

Est le sort le plus glorieux!

 

 

Toi qui consoles et qui charmes,

Qui rêves par les purs chemins,

Viens de tes diaphanes mains,

O Muse! viens sécher les larmes

 

De ces héros... de ces enfants

A qui la France doit de vivre!

A ceux que ton amour enivre

Annonce les soirs triomphants. 

 

Cri d'amour

 

O braves! que la mort effleura de son aile,

O vous! qu'elle a laissés sanglants sous les grands cieux,

Héros! qui partagez le destin glorieux

Des sublimes enfants qui s'endorment en elle...

 

Ecoutez!... C'est le cri de la FRANCE éternelle!

Il s'élève dans l'air frémissant et pieux...

Et c'est le cri d'amour de nos coeurs anxieux

Devant votre grandeur presque surnaturelle!

 

Comme un hymne fervent, qu'il monte où vous allez...

Qu'il arrive à votre âme, ô nobles mutilés,

Et vous apporte encor de la douceur de vivre...

 

O vous! que sans pleurer nos yeux ne peuvent voir!

Vous! dont le sacrifice est si beau qu'il enivre...

Symboles douloureux du suprême devoir!

 

 

Offrande

Poème suivi de la réponse du soldat.

Peu avant Noël 1914.

 

O cher petit soldat que j'aime,

A toi je songe bien souvent,

Toi qui, sous la pluie et le vent,

Accomplis ton devoir suprême!

 

Toi qui souffres, toi qui combats

Pour me garder ma belle FRANCE,

Toi dont l'ardeur et l'endurance

Redoublent, chaque jour, là-bas...

 

Accepte ma modeste offrande,

Je veux te rendre moins cruel,

Hélas! ce beau soir de NOël:

En te l'offrant, ma joie est grande!

 

Que l'humble présent te soit doux;

Qu'avec ma pensée, il apporte,

A ton âme attendrie et forte,

Le baiser d'amour de chez nous.

 

Pauline Plan

Institutrice, Soeur-Ainée,

A Marseille

 

 

 

Réponse du soldat

 

Merci 

 

A Mademoiselle Plan

 

C'est NOEL, il fait noir, il neige,

Le canon gronde et hurle au loin,

Et je rêve seul dans un coin

De la tranchée qui nous protège.

 

Car je songe aux Noëls joyeux,

NOELS de jadis pleins de charmes,

Ce soir, c'est le Noël des armes,

Et j'ai des larmes dans les yeux...

 

Le cher présent nous est bien doux

Puisqu'en se plis il nous apporte

Le souvenir qui réconforte:

Le baiser d'amour de chez nous.

 

Léon Gaudine,

Instituteur,

115ème Territorial, 2ème Compagnie



17/03/2014
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