Porete (Marguerite) vers 1250-1310
Marguerite Porete
Vers 1250-1310
Mystique du courant des béguines
brûlée avec son livre le 1er juin 1310
Consulter ici de larges extraits de son livre sur Internet
Marguerite Porete: Le Miroir des simples âmes anéanties
(traduit de l'ancien français par Claude Louis-Combet, coll. ATOPIA)
Voici ce qu'en dit le traducteur Claude Louis-Combet
" Le Miroir des simples âmes, dont le manuscrit avait été découvert en 1867... ne fut publié, dans sa version en langue d'oïl, qu'en 1946. Tout ignoré qu'il fût, aussi bien des érudits que des âmes pieuses, ce texte nous apparaît aujurd'hui comme une oeuvre majeure de la mystique occidentale. D'une sensiblité théologique proche de celle de Maître Eckhart, il développe, en une écriture magnifique, les thèmes les plus élevés de la spiritualité contemplative: le renoncement à l'identité propre, l'anéantissement de l'esprit dans la lumineuse ténèbre de la divinité, la communion au Dieu inidentifiable, la pure mélodie de l'âme amoureuse..."
Quelques courts extraits
Vous qui en ce livre lirez
Si le voulez bien entendre
Pensez à ce que vous direz,
Car il est difficile à comprendre;
Humilité vous faut prendre
Qui de Science est trésorière
Et des autres Vertus la mère
Théologiens et autres clercs,
Point n'en aurez l'entendement
Eussiez-vous l'esprit clair,
Si vous ne procédez humblement
Et qu'Amour et Foi ensemblement
Vous fassent surmonter Raison,
Elles qui sont maîtresses de la maison.
..........................
Raison demande à Amour
si ces Ames ressentent joies en elles-mêmes
Raison
Or dites-moi, Amour, ces Ames ressentent-elles des joies en elles ou en dehors d'elles?
Amour
Nenni. car leur nature est mortifiée et leur esprit mort.
Toute volonté est d'elles départie et, pour lors, vit-elle et demeure-t-elle et, grâce à cette mortification, est-elle en volonté divine.
Or écoutez, Raison, afin de mieux entendre ma réponse. celui qui brûle n'a pas froid et celui qui se noie n'a pas soif. Or, cette Ame est tellement consumée en la fournaise du feu d'amour qu'elle est devenue proprement feu, par quoi elle ne sent point de feu, car en elle-même elle est feu, par la vertu d'Amour qui l'a transportée dans le feu d'amour. Ce feu brûle de lui par lui en tous lieux et en tous moments sans recours à aucune matière et sans rien pouvoir tirer que de lui-même. Car quiconque a le sentiment de Dieu en raison d'une matière qu'il voit ou entend hors de lui et par le travail qu'il accomplit sur lui-même, celui-là n'est pas tout feu, mais la matière est mêlée à ce feu. Car le travail de l'homme et sa volonté d'avoir une matière extérieure à lui pour faire croître en lui l'amour de Dieu n'est qu'aveuglement de connaissance de la bonté de Dieu. Mais celui qui brûle de ce feu sans quérir matière et sans l'avoir ni la vouloir posséder, voit si clair en toutes choses qu'il perçoit les choses comme on doit les percevoir. Car cette Ame n'a nulle matière en elle qui l'empêche de voir clair, puisqu'elle est seule en lui, par la vertu de vraie humilité; et elle est commune à tous par la largesse de parfaite charité et seule en Dieu par la divine entreprise de Fine Amour.
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