Surville (Clotilde de) 1405-1498 ? ou début XIXème
Clotilde de Surville
1405-1498 ?
Retrouver le recueil de 1803 (poèmes d'amour...les quatre saisons...)
Retrouver un autre recueil de poèmes publié en 1827 (la Phélyppéide, plus épique)
Les (supposés?)manuscrits de Clotilde de Surville (fin 15ème siècle) ayant été découverts à la fin du 18ème siècle par un de ses descendants directs, le marquis de Surville, l'éditeur Charles Vandengourg publia en 1803 un recueil de ses poésies qui eut un succès fulgurant. Un second recueil daté de 1826 contient un éloge des femmes poètes attribué au marquis de Surville décédé en 1798, qui poursuivait alors des recherches sur les femmes poètes. Les notices qui accompagnent l'Epître paraissent très fantaisistes.
Clotilde de Surville a-t-elle vraiment écrit les poèmes qui lui ont été attribués? On peut en douter! Cette poétesse est d'abord représentative du style néogothique, ou "troubadour" très goûté au début du 19ème siècle. C'est à cette période en effet qu'apparaissent ses poésies qui suscitent l'entousiasme. Mais le débat est vif entre les admirateurs de la poétesse (Nodier) et ceux qui considèrent qu'il s'agit d'une supercherie (Sainte-Beuve). Voilà pourquoi je ne l'ai pas placé dans la partie "Moyen-Age".
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Nodier croit en l'authenticité de l'oeuvre. Voici les conclusions provisoires de Sainte-Beuve en 1841 (Revue des Deux Mondes):
1° Que les poésies de Clotilde ne sont pas du XVe siècle, mais qu’elles datent des dernières années du XVIIIe ;
2° Que M. de Surville en est l’auteur, le rédacteur principal.
Comme le montre ce tableau de Hillmacher (Musée de Montpellier), Clotilde de Surville est devenue l'emblème de la poésie "maternelle". L'écriture et l'enfant! On remarque que le fuseau de Mme des Roches (16ème) a été remplacé par un bébé. L'oeuvre de la dite Mme de Surville ne se réduisait pas à cela!
Ballade à mon espoux,
Lors, quand tornoit emprez un an d'absence, miz en ses bras nostre fils enfançon.
Aux premiers jours du printemps de mon aage,
Me pavanoy, sans craincte et sans dezir;
Rozes et lys yssoient sur mon visage;
Tous de mirer, et nul de les coeillir:
Maiz quand l'autheur de mon premier souspir
Les fust livrant au plus tendre ravage,
Lors m'escriay, me sentant frémollir:
"Faust estre deulx pour avoir du playzir;
Playzir ne l'est qu'autant qu'on le partage!"
Tousjours despuys, caressant le servage
Que par tes yeulx l'amour m'a fait subir,
Se ne te voy, me seroit affolage
Joye espérer, fors de ton soubvenir:
Maiz se reviens, soudain de tressaillir,
De te presser à mon tremblant corsage,
Et m'esgarer, pour trop bien le sentir,
Qu'il n'est qu'à deux d'espuyzer le playzir;
Playzir ne l'est autant qu'on le partage!
Or toutesfois, de ce triste rivage,
S'alloiz partant, emportoit le zéphir
Mes longs regrets; et ce précieulx gage
De tant d'ardeurs, ne les souloit blandir:
Maiz, grace à luy, plus ne sçauroy languir;
Lors qu'en mes bras serreray ton ymage,
Entre les tiens me cuyderay tollir:
Ung tiers si doulx ne faict tort au playzir;
Playzir ne l'es qu'autant qu'on le partage.
Envoy
Gentil espoulx, si Mars et ton courage
Plus contraignoient ta Clotilde à gesmir,
De luy monstrer, en son petiot langage,
A t'appeler, feray tout mon playsir;
Playsir ne l'est qu'autant qu'on le partage.
Extrait de la Phélyppéide
(Recueil de 1826-27)
L'engloutissement de l'Atlantide
(Selon l'éditeur, Clotilde de Surville aurait par ailleurs écrit une histoire de l'Atlantide en douze livres)
On vist maint champ de lorz, de vignes, d'oliviers,
Ou soubdain se dissouldre en fusibles graviers,
Ou lancéz, moult au loing de leurs bazes ferventes;
Sur deyz étangs nouveaulx flotter isles mouvantes,
Ou sur d'arides monts, s'en pièces translater:
Deyz rocs vifs, dans leyz airs, en pierres s'esclater;
Et de lacs, vomissants inextinguibles souffres,
Où masse en reposa, tourbilloner les gouffres;
Deyz sommetz rocailleux, d'abord couleur de fer,
De fer rougy mille ans aux forges de l'enfer,
Ez fond deyz eaux, parmi flotz écumeux d'Asphalte,
Eslancer jusqu'aux cieulx leurs cimes de Basalte,
Et bientôt dominer, en superbes géants,
Leurs aisnés qu'en fureur sapoient deux océans;
Qui, sur terres en feu, jà presque inhabitées,
Mesloient, avec fracas, leurs vagues irritées;
Deyz monstres, nés enfin de leur limon épais,
Sur nos fumants gravatz venir chercher la paix.
A cet affreulx signal, les montaignes s'affaissent:
Dans le sein dévorant tertres ugnis s'abaissent;
Et l'isle, où sur ung trosne eussent coulé meyz jours,
A meyz yeulx désolés disparoist pour toujours!
Maiz la destruction se consommoit à peine,
Qu'à travers l'atmosphère, incontinent sereine,
Char légier et sanz guide, à noz pieds descendu,
M'enlève;...
...........................
O mânes innocents, recevez meyz adieulx!
Que meyz accents plaintifs une route s'entrouvrent
Jusqu'au fond ténébreulx deyz ondes qui vous couvrent!
Puisse vouz appaizer l'hommaige de meyz chants,
Sacrés à recueillir voz fastes si touchantz!
Consolez-vous! heureulx peuple ainsy qui succombe!
Mieulx vauldroit, mesme jour, nous involvast la tombe,
Qu'à toute heure, gémir sur de nouveaulx cyprès,
Au monde où chaque paz accroist nos vains regretz,
Où le tamz, endormant toute humaine science,
Lentement démolit et travaille en silence.
Autre extrait de la Phélyppéide.
Clotilde supposait qu'avant la destruction de l'Atlantide, dont on a vu la description dans le neuvième chant, une première catastrophe avait englouti une partie de l'île, ou l'avait séparée du Continent...On doit se souvenir que les descendants d'Atlas étaient des géants anthropophages. (Note de l'éditeur)
Au midi deyz roschiers d'où ceyz monstres sauvages
Portoient, depuiz cent ans, leyz feulz et leyz ravages,
Soubz ung sceptre chéry, vivoient, indépendants,
D'Atlas et de Japet leyz fameulx descendants:
Eulx qui, soubz leyz drapeaulx d'ugne Royne prestresse,
Effroyèrent, jadis, l'enfance de la Grèce;
Qui, chargéz du butin de cent trosnes divers,
Et premiers conquérants du naissant univers,
Sçeurent, deulx fois vainqueurs de Neptune en furie,
Rentrer ez vaste seyn de leur doulce patrie;
Et disparaître aux yeulx du monde espoanté,
Comme ung vayn torbillon dans le vuide emporté.
On dict que l'Océyan, franchissant seyz barrières,
Bientost roula sur eulz seyz vagues meurtrières;
Que la terre s'oubvrit par maints esbranlements;
Que soubdain, toute en proye à de longs tremblements,
Afrique, avec trémeur, vist ses costes désertes
De cadavres sanglants et de desbris coubvertes;
Sy, qu'à l'heure où venoit Uran de s'engloustir,
De sa chuste ouyt-on l'abysme retentir...
Ne diray se Thétis, de nos loingtaines rives,
Dez lorz, ha dévoré leyz bornes primitives;
Le tamz, qu'espand sur tout ugne profonde nuict,
Comme icy, parmy nous en consacra le bruict...
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