Widmer-Curtat (Mary): Les Voeux de la Colline et de Valmont (1919)
Mary Widmer-Curtat
(Pour en savoir plus sur Mary Widmer-Curtat, la Colline et Valmont
(Jamais plus sombre nuit...)
Jamais plus sombre nuit n'a régné sur la terre,
Les coeurs, en frémissant, ne pensent qu'à la guerre,
La douleur et la mort sont dans tous les pays;
Le premier jour de l'an ne verra que des larmes,
Des frères ennemis, las de porter les armes,
Et les bonheurs humains menacés ou détruits.
Accueillez de Val-Mont le souvenir fidèle
Dans le ciel obscurci fugitive étincelle,
Rayon furtif et doux, en attendant le jour.
Ne faut-il pas aimer, aimer, aimer quand même,
Et dans le monde entier dire à ceux que l'on aime
Des paroles de foi, d'espérance et d'amour?
1er janvier 1915
(Passez, passez...)
Passez, passez, jours de détresse
Qui dans nos coeurs tumultueux
Versez la haine avec l'ivresse
L'espoir et le chagrin affreux.
O viens, mystérieuse année,
Apporter la paix ici-bas,
La paix enfin, la paix glanée
Aux champs des meurtriers combats.
Donne à ceux que cherche notre âme
A l'heure où sonne un nouveau jour
Pour les éclairer de leur flamme
La foi, l'espérance et l'amour.
1er janvier 1916
(J'ai levé les yeux...)
J'ai levé les yeux, las de voir les choses,
Les choses qui font pleurer et souffrir,
J'ai levé les yeux vers les cieux, tout roses
Des rayons du soir qui s'en vont mourir.
Mon oeil cherche au loin la réponse enclose
Dans tout l'inconnu, quand je dis: pourquoi?
Pourquoi tous ces deuils? ce mal qui s'impose?
L'esprit douloureux souffre et se tient coi.
Mais le coeur aimant, à l'angoisse oppose
Le rayonnement d'immenses espoirs
Semé sur les monts et la ville close,
Et près des foyers lumineux ou noirs.
Amis, dispersés par l'atroce chose,
Amis, tourmentés par tout l'incertain,
Qu'au moins votre coeur, un instant, repose
Sur notre amitié d'hier et de demain.
1 er janvier 1918
(De l'orage effrayant...)
De l'orage effrayant la rumeur vibre encore,
Mais l'éclair s'est éteint et voici le soleil;
Du jour brillant et pur qu'il réchauffe et colore
Monte un chant de bonheur qui s'en va jusqu'au ciel.
Et nous tendons les bras d'ardente bienvenue
A la paix qui sourit debout sur notre seuil,
Souveraine des coeurs, trop longtemps méconnue
Des humains qui marchaient dans les sentiers du deuil.
Et c'est dans la beauté de la paix fortunée,
Dans un bonheur, voilé d'un sentiment profond,
Que nous vous envoyons pour la nouvelle , année
L'amical souvenir et les voeux de Val-Mont.
1er janvier 1919
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